Au passage, quelques remarques sur la différence entre le monde artistique en Europe (enfin, Bruxelles) et au Rwanda (enfin, à Inema).
Inema est une galerie ultra connue à Kigali. Ce n'est pas la seule dans la ville - il y en a environ 5 ou 6 autres - mais c'est celle où tout le monde va. Elle figure dans les top trois lieux à visiter à Kigali, ce qui fait qu'à peu près tous les touristes y viennent tôt ou tard, soit pour visiter la galerie en tant que telle soit pour profiter de la happy hour de jeudi. Et ils achètent. Pas tous, évidemment, mais il y en a beaucoup qui ont un coup de coeur sur une pièce et qui sont prêts à faire un sacrifice pour pouvoir l'acheter - comme une famille israélienne, qui avait mis de côté 1 500 dollars pour aller voir les gorilles mais qui les a finalement consacrés à acheter trois peintures de Kenneth. Et il y a aussi des gens qui ont simplement beaucoup d'argent, et qui peuvent se permettre de mettre 2 000, 5 000 ou 15 000 dans un tableau. Je pense que la galerie bénéficie aussi d'un effet surprise, parce que la plupart de gens ne s'attendent pas à trouver du bon art en Afrique (traduction: de l'art moderne à l'occidental, et pas juste de l'art africain) et ont envie de soutenir les artistes. Il y en a beaucoup qui deviennent des amis avec eux et qui restent en contact une fois retournés dans leur pays (et les artistes en profitent, ils voyagent un peu partout dans le monde visitant leurs amis).
Du coup, les artistes d'Inema sont capables de vivre de leur art. Après, comme me disait Kenneth, ils ne sont jamais sûrs de vendre. De son côté, il a beaucoup vendu au début de l'été, mais là ça fait plus de deux mois qu'il n'a pas vraiment vendu. Sa théorie est que chacun des artistes d'Inema a ses mois pendant lesquels il vend beaucoup, il ne sais pas trop pourquoi, et ensuite il passe le reste de l'année à ne pas vendre du tout. Donc il faut quand même être prêt à survivre lors des mauvais mois et à continuer à investir dans le matériel de peinture, et à créer sans être sûr du retour.
En Europe, on le sait bien, la situation est très différente et peu d'artistes sont capables de vivre de leur art, sauf quand ils sont très très connus. J'ai été étonnée de voir les prix en Europe, et à quel point même du très bon art était vendu rien du tout… J'ai bien aimé la petite galerie de Ben à Bruxelles, mais je doute que les pièces de Kenneth vont se vendre, même si on a baissé les prix de plus de moitié. La plupart des tableaux qui y sont vendus sont vraiment petits. Et vendre un tableau à 200 eur, ça ne suffit pas vraiment à l'artiste, quand on se rend compte qu'il doit payer un pourcentage à la galerie (entre 15 et 30% en général), que parfois il a dû payer un loyer (plusieurs centaines d'euros), qu'il doit payer 30% d'impôt, et que dans notre cas, il a dû se payer le billet d'avion pour venir au vernissage (autour de 600 eur).
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